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Guerre en Ukraine : vers une trêve incertaine portée par Washington

Par : Yuliana Glazunova - le 28 mars 2025


Photo : RTS

Les récents pourparlers autour d’un cessez-le-feu en Ukraine traduisent la montée en puissance des États-Unis comme arbitre central dans cette crise complexe. En approfondissant les dimensions diplomatiques, économiques et stratégiques, un tableau nuancé des enjeux globaux émerge.

Des négociations sous tensions

Les discussions entre la Russie, l’Ukraine et les États-Unis se sont intensifiées, notamment sous l’impulsion de Donald Trump, qui s’efforce de réconcilier les positions divergentes. Parmi les priorités figurent l’arrêt des frappes russes contre les infrastructures civiles ukrainiennes, comme les centrales électriques et les réseaux de distribution énergétique. Cette condition est cruciale pour rétablir une certaine stabilité à court terme, notamment dans les régions urbaines de l’Ukraine durement touchées cet hiver.

Les échanges de prisonniers, un sujet sensible pour les deux camps, sont également au cœur des discussions, avec des propositions concrètes d’échange massif visant à restaurer un climat de confiance minimal. Cependant, la réticence de la Russie à accepter un encadrement international des conditions de la trêve reste un obstacle majeur.

Washington a par ailleurs sollicité des pays tiers, comme l’Arabie saoudite, pour jouer un rôle de médiateur dans ces négociations, illustrant une stratégie élargie qui transcende le simple dialogue bilatéral. Ce choix reflète une tentative d’apaiser les craintes globales, mais aussi de renforcer le poids des États-Unis dans le système multilatéral.

Enjeux économiques et stratégiques

Au-delà des aspects militaires, les répercussions économiques de la guerre en Ukraine figurent au centre des préoccupations. Le blocus russe des ports ukrainiens en mer Noire a sévèrement impacté les exportations agricoles mondiales, notamment celles de blé et d’huile de tournesol. Les pays en développement, particulièrement en Afrique et au Moyen-Orient, ont vu leurs chaînes d’approvisionnement perturbées, exacerbant l’insécurité alimentaire.

Une trêve pourrait permettre la reprise des exportations agricoles et atténuer la flambée des prix des denrées alimentaires. Cependant, les négociations actuelles peinent à garantir un cadre de sécurité maritime durable. Les efforts visant à établir un corridor de navigation protégé en mer Noire, sous la supervision d’organismes internationaux, font face à des divergences de vision entre les parties prenantes.

Sur le plan stratégique, la guerre en Ukraine a aussi stimulé la demande en équipements militaires dans toute l’Europe. Alors que les États membres de l’Union européenne envisagent un plan de financement de 150 milliards d’euros pour renforcer leur défense, la guerre accélère la transformation des priorités budgétaires en faveur de l’industrie militaire. L’Europe, bien que solidaire avec l’Ukraine, se heurte cependant à des désaccords internes, notamment sur la manière d’équilibrer soutien militaire et efforts diplomatiques.

Une dynamique incertaine

Malgré les initiatives américaines, une trêve stable reste hautement incertaine. L’approche maximaliste de Vladimir Poutine, qui exige des concessions territoriales de la part de l’Ukraine, complique les perspectives d’accord. Par ailleurs, Kiev, soutenue par les alliés occidentaux, se montre inflexible sur la question de l’intégrité territoriale, rendant difficile tout compromis rapide.

L’implication croissante des États-Unis dans les négociations reflète aussi leur volonté de contenir les répercussions géopolitiques du conflit. Toutefois, les divergences entre Washington et certains de ses partenaires européens, comme la France et le Royaume-Uni, mettent en lumière une coordination occidentale parfois fragile. Ces désaccords pourraient affaiblir le front uni face à Moscou, particulièrement si la Russie réussit à exploiter ces divisions pour renforcer sa position dans les négociations.

Enfin, la dimension énergétique ajoute une complexité supplémentaire. La guerre a exacerbé la transition énergétique en Europe, avec une volonté accrue de réduire la dépendance au gaz russe. Néanmoins, les ajustements nécessaires demandent du temps, ce qui limite la capacité des Européens à peser dans les discussions à court terme.

Les négociations actuelles autour d’un cessez-le-feu en Ukraine représentent une lueur d’espoir, mais elles sont entravées par des désaccords profonds et une méfiance mutuelle entre les acteurs. La guerre dépasse largement les frontières ukrainiennes, impliquant des enjeux économiques, stratégiques et humanitaires globaux.

Si les États-Unis parviennent à obtenir une trêve, ils auront renforcé leur rôle de médiateur dans une crise où les ambitions des grandes puissances s’entrecroisent, mais le chemin vers une paix durable semble encore long et semé d’embûches.



Yuliana Glazunova

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Diplômée d’un Master en Études européennes et internationales de l’université Paris-Nanterre en 2023, elle se spécialise en géopolitique de l’espace Eurasie. Également chargée de veille Asie Centrale - Acteur chinois au sein de l’Observatoire Français des Nouvelles Routes de la Soie, ses études portent sur les relations diplomatiques, les échanges commerciaux et les problématiques sociologiques des pays de la zone eurasiatique.


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